France, Afrique, ….Faut-il pleurer Chirac ?

Le chœur des médias

A l’annonce de sa mort, radios, télévisions…ont immédiatement bouleversé leurs programmes pour rendre compte, à chaud, de la carrière « exceptionnelle » de l’ancien chef de l’Etat français.

Le lendemain matin, la quasi totalité de la presse écrite présentait des Unes barrées de noir en hommage à son décès. Les jours suivants, dans ce climat d’émotion médiatique, on entendait des propositions, issues de toute part, évoquant l’entrée possible de l’ex président français au Panthéon, des demandes d’obsèques nationales, de mise en berne des drapeaux, de moments dédiés dans les écoles…

Et puis, curieusement, l’emballement médiatique laissa la place à d’autres préoccupations, comme si l’Élysée, et les médias à sa suite, souhaitaient, en fin de compte, rapidement tourner la page.

En fait, trop était peut-être trop et le personnage en question quant à lui n’était, dans l’opinion, peut-être pas si populaire qu’il n’y paraissait.

Une ligne politique très contestée

Parvenu à ses fins, la magistrature suprême, après moult combinaisons, trahisons et magouilles en tout genre, Jacques Chirac, malgré ses efforts pour se donner des aspects « proche du peuple », n’était au fond que le représentant d’une part très aisée de la population dont il aura, tout au long de sa carrière, défendu les seuls intérêts tant au niveau national qu’au plan international.

Lorsqu’en 1995, avec Juppé, il prétend s’attaquer au régime des retraites des salariés, il déclenche une vague de mouvements sociaux telle que, n’étant plus en mesure de gouverner, il finira par « licencier » Juppé, dissoudre l’Assemblée Nationale et procéder à de nouvelles élections au terme desquelles il perdra sa majorité au parlement.

Porté une nouvelle fois à la présidence grâce au subterfuge de la « menace » Le Pen présent au second tour des élections, il entreprend, avec De Villepin, de s’attaquer à la protection des salariés en cherchant à introduire par la bande, les fameux CPE.

Encore une fois les mouvements sociaux étaient d’une telle importance qu’il était contraint d’abandonner purement et simplement son projet.

Tout comme sur la question des retraites, il reculera, il capitulera, commençant par-là, à perdre la confiance du patronat.

Il aura également à son bilan le soulèvement des quartiers populaires et la répression, sa lutte anti-migrants, ses saillies racistes puisées directement dans le répertoire du Front National, etc…etc…

Le Continent Africain se souvient…

Jacques Chirac, c’est essentiellement le retour aux affaires des Jacques Foccart et des Pasqua, autrement dit le règne des années les plus noires de la Françafrique.  La loi des coups tordus et des coups d’état incessants, de la corruption, des valises pleines de billets direction les poches du RPR, des casinos et des jeux, de l’intronisation de la pègre, des maffias Corses et autres…qui vont ravager l’Afrique pour des années et des années.

C’est enfin, aussi, l’activité directe de l’armée française dans les affaires intérieures de pays du Continent, indépendants et souverains.

C’est l’opération Licorne qui fera des dizaines de jeunes manifestants tués et blessés en Côte d’Ivoire, pays déstabilisé par le pouvoir chiraquien au titre que son président, élu, ne passe pas par les fourches caudines de l’Elysée.

François-Xavier Verschave le décrit dans son ouvrage Noir Chirac en ces termes : « une tête de pont de la Françafrique, acceptant les alliances les plus ahurissantes, couvrant les basses oeuvres des uns et les exactions des autres, pour préserver les « comptoirs » et les secrets d’Etat de notre pays. Voilà le portrait en relief d’un Jacques Chirac homme d’action, plus redoutable dans l’ombre que dans la lumière. »

Faut-il le rappeler, l’Afrique est devenue la machine à sous de la France depuis de Gaulle. Dans le journal du Dimanche en septembre 2011, l’avocat Robert Bourgi, disciple de Jacques Foccart en Afrique laissait entendre que, pour cette campagne de 2002, Chirac a reçu un total de 10 millions de dollars en liquide de la part de cinq chefs d’État africains : le Sénégalais Abdoulaye Wade, le Burkinabè Blaise Compaoré, l’Ivoirien Laurent Gbagbo, le Congolais Denis Sassou Nguesso et, bien entendu, le Gabonais Omar Bongo. Selon Me Bourgi, l’argent passait par des mallettes ou des djembés et arrivait sur le bureau du secrétaire général de l’Elysée, Dominique de Villepin.

Chirac à l’instar de plusieurs hommes politiques français, a siphonné l’argent de pétrole et autres minerais des pays africains pour leur campagne avec la complicité directe des africains.

Et la Nouvelle Calédonie…

Aux affaires au moment fort de la lutte des kanaks pour leur indépendance, pour répondre à une situation où des militants se sont réfugiés dans une grotte pour se protéger des forces de « l’ordre », Chirac cautionnera la manière forte qui conduira un peloton de gendarmes spécialisés à investir l’endroit et à s’y livrer à un véritable carnage.

Chirac laissera ainsi dans les mémoires l’image d’un politicien de sa classe sociale dont il fut, tout au long de sa vie, le digne représentant et l’ardent défenseur.

Antisocial, néocolonialiste, homme de réseaux, Chirac laissera au total, un bilan qui ne donnera aucun regret à toutes celles et ceux qui voient dans la politique le moyen de changer le cours des choses pour une entente entre les peuples et pour une vie meilleure.

Par François Charles et Romuald Boko

 

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