L’organisation de la prochaine élection présidentielle est porteuse de lancinants points de fragilité et discorde.
La tenue d’élections démocratiques et libre, consacrée tant par les instruments juridiques nationaux que communautaires, régionaux et universels, auxquels s’est engagé le Bénin, suscite malheureusement, contre toute attente, des réserves , des inquiétudes et des appréhensions.
L’absence de consensus dans la négociation des règles du jeu électoral surtout la question de parrainage apparaît à tous égards comme un facteur de conflits et de crises en gestation.

L’opposition béninoise prise au piège
Prise entre le marteau de l’impréparation, de l’inorganisation et l’enclume de manque d’un leadership, l’opposition béninoise a tout à se reprocher de son exclusion de la présidentielle d’avril 2021.
D’un côté, comme en 2016, un candidat, fut-il populaire et nanti a été parachuté pour porter l’étendard des Démocrates. La leçon de l’échec du candidat ‘’français’’ Lionel Zinsou en 2016 n’aura servi à rien. Bis repetita, toujours sous la houlette de l’ancien President Boni Yayi, une candidate « made in Togo » tombe sur la tête du parti. Eric Houndete aura été mis devant le fait accompli. Reckya Madougou devrait désormais défendre les couleurs des Démocrates. Et dans un accord apparent, l’oiseau rare est retrouvé pour restaurer la démocratie et l’état de droit au Benin volés au béninois depuis 2017.
D’un autre, la porosité du parti et la faiblesse d’esprit de certains membres avides du gain facile et de pouvoir ont favorisé l’infiltration et par ricochet « l’éclatement » du parti qui – disons le haut et fort – a perdu le nord.

La Team Reckya Madougou
Parcours irréprochable, carnets d’adresses bien rempli, figure angélique, communication à la pointe de la technologie 2.0…
Reckya Madougou potentialise tout pour challenger de fort belle manière le candidat de la rupture. Mais ce dernier, ayant verrouillé tout par la loi a une grande longueur d’avance sur la candidate des Démocrates.

Talon, le maitre du jeu ?
Calme, discret mais très rusé plus que le renard de Djakotomey, le Président Talon apparaît incontestablement comme le maitre du jeu. Avec toutes les manettes en mains, il manipule, et l’opposition et la mouvance ; même la société civile a perdu son beau latin d’antan. Dans la galaxie politique béninoise, il n’y a point d’équation insoluble pour lui. C’est lui qui impose les règles du jeux – la classe politique étant à sa solde, mêmes les plus insoumis vieillards de la vieille garde -, il est tout simplement le chef d’orchestre, le maitre à penser, le réalisateur et en même temps le metteur en scène. Hypnotisés, bouche-bée et bons spectateurs, tous le regardent faire et défaire les lois et textes selon que ça l’arrange ou pas. C’est un véritable créateur de la chose politique. Une nouvelle école tout court.

Aivo, ou le rêve brisé
A un moment donné, le professeur Joel Frederic Aivo a pris le terrain en politique en otage devenant le seul, ou presque le seul challenger serieux capable de faire face et de battre un candidat aussi redoutable comme le president au pouvoir, Patrice Talon candidat à sa propre succession. Meme au sein de la mouvance presidentielle et ce, malgré la mainmise sur toutes les institutions de la republique, le doute a commencé à s’installer. Son dialogue ittenrant à travers le Benin a revelé combien de fois le peuple béninois a soif de voir une nouvelle gouvernance à la tête du pays. Pour le candidat, « c’est la montée irréversible de la vague populaire qui fera renaître, demain, le Bénin que nous aimons ».
Mais la question de parrainage viendra briser son rêve, celui de ses milliers de militants et sympathisants. Toutefois, la vision du constitutionnaliste reste intacte : rassembler les béninois et apaiser le pays, rétablir la démocratie ; relancer l’économie en cassant les monopoles et en favorisant les investissements, redistribuer l’économie nationale et repositionner le Bénin sur la scène internationale. Comme pour dire, arracher au caméléon sa couronne, il ne perdra jamais sa démarche royale.

Le jeu flou de Azanai?
Incompris dans sa philosophie politique et accusé de pactiser toujours avec le pouvoir de Patrice Talon, Candide Azanai apparaît néanmoins comme un acteur politique important dans la vie politique du Bénin.
Spécialiste des stratégies électorales, Azanai aurait le mérite d’avoir prévu sitôt la trajectoire politique sous le régime de Talon. Toutes ses thérapies pour organiser la résistance et « activer l’article 66 » restent  inefficaces.
Mais l’homme reste très austère et critique envers le pouvoir en place et multiple les attaques tous azimuts.
Une seule hirondelle peut-elle faire le printemps ?

L’absence de certains leaders de l’opposition sur le territoire
C’est le Bashing total sur certains politiciens en l’occurrence Komi Koutché, Adjavon, Lehady, Djenontin etc…

Komi Koutché
Très attendu pour ce rendez-vous de 2021, Komi koutché reste une idole pour le
Peuple béninois majoritairement jeune. Hommes et surtout les femmes l’attendaient pour le porter au pouvoir. L’homme a toutes les qualités pour cette mission.
Souriant et serein, Komi Koutché affectueusement appelé kk, apparaît comme un ange libérateur d’un peuple qui ploie sous le poids de la rupture. Du vendeur de Tchakpalo au plus haut cadre de l’administration, et même au sein de la diaspora, les impressions en sa faveur donnent l’écho d’un ange.
Mieux, la jeunesse le présente comme son miroir et finit par l’imposer dans l’opinion publique comme un label de sa génération malgré les multiples tentatives de ternir son image suivis d’une traque infernale.
Son secret n’est pas forcément dans sa boite à diplômes assez pourvue. Loin s’en faut. Mais dans sa capacité à gérer les ressources humaines dans leurs complexités et dans leurs diversités. Sa grande capacité d’écoute et sa grande mémoire font de lui un grand homme d’Etat qui fascine l’histoire tant par son passé, son présent que son futur.
Mais, la rupture ayant constaté l’incontestable popularité de l’homme de Bantè, l’a contraint en exile afin d’éviter toutes surprises désagréables. De toute évidence, l’ancien argentier prépare sans doute son come back pour les échéances à venir. Pour lui, le destin est comme une rivière, il trouve toujours son chemin.

Sebastien Adjavon
Faiseur de roi en 2016, le péché mignon que le roi de poulet Sebastien Adjavon a commis, c’est d’avoir « dealé » entre les deux tours à Patrice Talon.
Alors que tout le monde croyait à un take-off économique du pays avec le mariage entre les des deux plus fortunés du pays, avec 400 millions de dollars pour Talon et 350 millions pour Adjavon (2015), l’on assiste malheureusement à une guerre larvée entre eux, toute chose qui aliène le développement du pays.
Il fallait à tout prix anéantir le richissime homme d’affaires beninois dont l’inégalable richesse ferait soumettre à sa volonté une grande partie des béninois.
La faute de Adjavon, c’est de n’avoir pas compris que les accords en politique sont comme des pacotilles. D’ailleurs le Président Talon dirait plus tard : « En politique, il n’y a que des partenariats de circonstance ».
Adjavon, aujourd’hui matraqué et contraint en exile par une condamnation par contumace à 20 ans d’emprisonnement ferme, doit indubitablement apprendre la leçon et maîtriser les quadratures de la politique béninoise, sinon les quadratures de la politique tout court.
Son objectif c’est d’arracher le pouvoir à Patrice Talon en 2021. Mais malheureusement, il n’y avait pas mis de la méthode. De toute façon, c’est n’est qu’une bataille de perdu. Et non la guerre…

Lehady, Djenontin et autres…
Comme les grosses cylindrées en exile, ils vivront certainement eux aussi les élections de loin depuis leur pays d’asile. Leur absence du territoire ne leur permet guère d’être efficaces sur le terrain politique. Mais ils multiplient les prises de parole pour se faire entendre et défendre la démocratie chèrement acquise au prix de lourd sacrifice.

théâtralisation politique
Hounkpè et Djimba d’une part, Cohoué et Agossa d’autre part, sont des pseudos candidats montés de toute pièce pour accompagner et cautionner la présidentielle prochaine. Jamais dans l’histoire politique du Bénin, aucune élection présidentielle n’a autant été décriée. Ces deux duos validés par la Commission électorale nationale autonome ( Cena) ont ainsi obtenu leur ticket pour participer à la présidentielle d’avril 2021. En tout cas, le pouvoir a su jouer le jeu politique avec deux duos « marionnettes » afin que la fête soit belle. Ça aussi, c’est la stratégie politique et en politique sous nos tropiques, tous les coups sont permis.

 

Par Romuald Boko
08/03/2021 dans
le magazine L’Autre Afrique