Le « Moskva », navire russe, a été coulé par des missiles ukrainiens
L’Ukraine avait affirmé l’avoir frappé avec un missile alors que la Russie expliquait que l’explosion avait été causée par un incendie accidentel.
Il s’agit pour la Russie de l’un de ses plus gros revers et d’une humiliation majeure. Le Moskva, vaisseau amiral russe en mer Noire, a coulé jeudi après avoir été touché par un missile ukrainien selon Kiev, en raison d’un incendie accidentel, selon Moscou, un déboire majeur laissant craindre une escalade du conflit alors que la Russie accuse l’Ukraine de bombarder des villages sur son sol.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, le ministère russe de la Défense avait reconnu que ce navire lance-missiles de 186 mètres de longueur avait été « gravement endommagé » par un incendie qui a provoqué l’explosion de munitions et que son équipage de plus de 500 hommes avait été évacué. Le gouverneur ukrainien de la région d’Odessa, Maxime Martchenko, a affirmé de son côté que les forces armées ukrainiennes avaient frappé le Moskva avec des missiles de croisière Neptune de fabrication ukrainienne, lui infligeant d’« importants dégâts ».
Vendredi, un haut responsable du Pentagone a confirmé que le croiseur russe a bien été coulé par deux missiles ukrainiens. « Nous estimons qu’ils l’ont touché avec deux Neptune », a indiqué à quelques journalistes ce haut responsable ayant requis l’anonymat, démentant ainsi la version de Moscou.
Un « coup dur » pour la flotte russe
La perte de ce navire de commandement est « un coup dur » porté à la flotte russe dans la région, a déclaré jeudi le porte-parole du Pentagone John Kirby, avec « des conséquences sur leurs capacités » de combat, le navire étant un « élément clé de leurs efforts pour établir une domination navale en mer Noire ». Le Moskva « assurait la couverture aérienne des autres vaisseaux pendant leurs opérations, notamment le bombardement de la côte et les manœuvres de débarquement », a détaillé de son côté le porte-parole de l’administration militaire régionale d’Odessa Sergueï Bratchouk, sur Telegram. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a enfoncé le clou dans son message vidéo rituel du soir en faisant référence aux Ukrainiens comme « ceux qui ont montré que les navires russes ne peuvent qu’aller au fond ».
Le recours au nucléaire ?
Les revers militaires en Ukraine pourraient inciter le président russe Vladimir Poutine à recourir à une arme nucléaire tactique ou de faible puissance dans ce pays, a prévenu jeudi William Burns, le chef de la CIA, principale agence de renseignement américaine. Mais « nous n’avons pas vraiment constaté de signes concrets comme des déploiements ou des mesures militaires qui pourraient aggraver nos inquiétudes », a-t-il toutefois insisté.
Traduisant dans les mots le niveau d’hostilité extrême atteint dans ce conflit, autant que la gravité des atrocités imputées aux forces russes, le Parlement ukrainien a voté jeudi une résolution qualifiant l’offensive russe de « génocide ». « Les agissements de la Russie visent à anéantir de façon systématique et cohérente le peuple ukrainien, à le priver du droit à l’autodétermination et à un développement indépendant », explique le texte.
Des accusations de bombardements ukrainiens
En retour, la Russie a accusé l’Ukraine d’avoir bombardé des villages russes frontaliers. Le comité d’enquête russe a affirmé que deux hélicoptères ukrainiens « équipés d’armes lourdes » étaient entrés en Russie et avaient procédé à « au moins six frappes sur des immeubles d’habitations dans le village de Klimovo », dans la région de Briansk. Sept personnes, dont un bébé, ont été blessées « à des degrés divers », selon ces accusations russes, dont le bien-fondé est impossible à vérifier de manière indépendante.
Le Conseil national de sécurité et de défense ukrainien a rejeté ces affirmations, accusant les services secrets russes de mener des « attaques terroristes » dans la région frontalière pour alimenter « l’hystérie anti-ukrainienne ». La Russie, dont l’offensive massive annoncée dans le Donbass n’a toujours pas commencé et qui peine à prendre le contrôle total de Marioupol, un port stratégique de la mer d’Azov, a menacé de frapper des « centres de prise de décision » à Kiev.
Le navire qui a participé à l’attaque de l’île aux Serpents
Le croiseur Moskva avait participé dans les premiers jours de l’invasion à une attaque contre l’île aux Serpents, située en mer Noire, près de la frontière roumaine, au cours de laquelle 19 marins ukrainiens avaient été capturés. Ils avaient par la suite été échangés contre des prisonniers russes. Mis en service en 1983 sous le nom de Slava, le croiseur avait par la suite été rebaptisé Moskva. Équipé de seize lanceurs de missiles antinavires P-1000 Vulcan ainsi que d’une variété d’armes anti-sous-marins et antiaériennes, il avait été affecté au second semestre 2015 en Méditerranée orientale pour protéger la base aérienne russe de Hmeimim, en Syrie, selon l’agence Tass.
Le conseiller de la présidence ukrainienne Oleksiy Arestovytch a en outre ironisé sur le fait que le Moskva était le fameux « navire militaire russe » qui, intimant de se rendre au début de la guerre à une poignée de militaires ukrainiens en poste sur une petite île de la mer Noire, s’était vu répondre par radio : « Navire militaire russe, va te faire foutre ! » L’enregistrement de cet échange avait fait le tour du monde et servi de leitmotiv à la résistance ukrainienne, apparaissant même sur des pancartes au cours de manifestations de soutien à l’étranger.
Source AFP