Barkhane : Enfin l’armée française doit quitter l’Afrique !
Qu’il soit clair que depuis 2018, la rédaction du magazine L’Autre Afrique demandait le retrait pur et simple de l’armée française de l’Afrique. En effet, les menaces qui pèseraient sur le monde et que seule la France protègerait de son corps, ne sont que balivernes grotesques et cache-sexe d’une occupation militaire ne visant qu’à préserver ses seuls intérêts bien compris. N’avait-t-on pas entendu récemment, sur les antennes de la Radio France Internationale un représentant de l’administration militaire déclarer que : « la France étant la seule à crapahuter sur le terrain, il n’est pas logique que d’autres y viennent pour y faire des affaires». Hier comme aujourd’hui donc, l’Afrique de l’Ouest et du Centre, chasse gardée de la France ! Sans doute la raison pour laquelle, malgré ses appels répétés et très appuyés, la France ne trouve en Europe aucun soutien à ses menées militaires. Enfin, à propos de la sécurité sur place, iI suffit de regarder la situation des populations dans les pays concernés pour comprendre que, le soit disant «intérêt des peuples du Sahel» n’a vraiment aucune espèce d’importance aux yeux de l’occupant. En réalité, depuis ces six (6) années que l’armée française « quadrille le terrain », la sécurité des populations est autant, voire davantage dégradée qu’avant l’intervention. Le Burkina Faso, pour seul exemple, est en proie aujourd’hui à une avancée de bandes armées qui, se réclamant ou non du Jihad, terrorisent les populations, attisent les conflits latents entre nomades et sédentaires autour des points d’eau, et poussent des centaines de milliers de réfugiés vers les agglomérations. Les groupes se réclamant du jihad continuent de sillonner toute la région et, outre les militaires français, ce sont des centaines de soldats maliens et de civils tués depuis le début de l’opération plus de 100 militaires pour les seuls deux derniers mois !). Idem pour le Mali qui est sous influences djihadistes et surtout depuis les récurrents coups d’état militaires. Alors que, sous protection militaire, les affaires continuent au mieux pour Areva et Total, que les grandes entreprises françaises poursuivent leurs activités commerciales sans envisager de retrait, ne semble-t-il pas curieux que Barkhane et la France, «bouclier du monde», ne puissent venir à bout de quelques bandits juchés sur leurs 4X4 Toyota lorsqu’il s’agit de protéger les populations indigènes ? L’Afrique, quoiqu’en disent la France et ses marionnettes locales, n’a nul besoin qu’on vienne l’envahir pour assurer non pas sa protection mais permettre la continuation du pillage de ses richesses. L’Afrique doit demeurer aux africains et l’armée française, paravent des entreprises privées, doit quitter le continent, immédiatement et sans condition. Macron l’a finalement compris depuis le feuilleton des coups d’Etat au Mali et la mort du maréchal président Idriss Deby Itno et annonce le retrait de Barkhane, une opération menée au Sahel et au Sahara par l’Armée française, avec une aide secondaire d’armées alliées, qui vise à « lutter contre » les groupes armés salafistes djihadistes dans toute la région du Sahel.
Qui veut du G5 Sahel ?
Clairement, le président français a été à la manœuvre pour pousser L’Autre AfriqueN°036 – Juin 2021 7 au montage de ce G5. Il n’est un secret pour personne que Paris, sans se désengager complètement du bourbier malien verrait d’un bon œil une « relève » se mettre en place qui lui permette de «rêver» d’une autre perspective que le tunnel sans issue dans lequel l’a imprudemment fourrée le président Hollande. Comme nous l’avons signalé précédemment la Région concerné est immense, truffée de douzaines de groupes armés indépendants les uns des autres, parfois alliés, parfois non. L’éclatement de la Libye par les armées françaises et anglaises avait déjà considérablement alimenté en armes et en combattants l’ensemble de la Région, y compris dans les régions plus au nord, vers l’Algérie par exemple. Les défaites de l’EI en Irak et Syrie jouent aujourd’hui, à nouveau le même rôle. Force est donc de constater qu’aujourd’hui, malgré ses plus de 5000 hommes déployés en permanence, ses énormes moyens militaires opérationnels, sa haute technologie de combat, l’armée française ne «s’en sort» pas ou, en tout cas, qu’elle ne maitrise pas la situation aussi bien qu’elle le pensait lors de l’invasion du Mali. Qui plus est, force est de constater que tant au plan financier qu’au plan humain, le «maintien de la paix» tourne au fiasco : les dépenses s’accroissent, des soldats français sont régulièrement pris pour cible et le Mali, après toutes ces années de «pacification» n’est toujours pas sous contrôle. La France compte donc sur l’éventuelle efficacité de ce G5 Sahel pour mettre progressivement un frein à ses propres interventions. Déjà, pour diminuer les coûts, la France, avec les autres pays européens ont mis en place un programme visant à déléguer à des drones toute une partie des opérations militaires classiques. Mais cela ne suffira pas et alors que la France, comme l’Allemagne désormais, considèrent que le Sahel est pour elles, une région stratégique tant au plan économique que géopolitique il ne s’agit pas de reculer. Dépenser moins mais ne pas abandonner le terrain, telle était l’équation. Il fallait donc trouver une force pour suppléer les forces françaises engagées et justement, en permettre le désengagement progressif. Cette force est donc ce fameux G5 Sahel. Visiblement l’UE, Macron, Markel et leurs alliés, avec le G5 Sahel, pensent avoir résolu l’équation. A voir… A voir, en effet, si l’efficacité d’une force afro-africaine sera au rendez-vous, avec des soldats peu motivés pour défendre des intérêts économiques étrangers, peu aguerris, peu enclins à risquer leur peau pour des soldes de misère…
La Russie se positionne-t-elle déjà ?
Déjà liée avec le Mali par des accords de coopération militaire, la Russie use de tous les stratagèmes pour profiter de la situation politique et sécuritaire pour avancer ses pions à Bamako. Pendant que la France met fin à l’opération Barkhane au Sahel sous sa forme actuelle, Moscou veut se proposer en alternative à la France dans la région. C’est de bonne guerre dans la nouvelle conquête géopolitique africaine. Considérant que l’opération Barkhane est un échec, le sentiment anti-français naît, grandit et rapproche davantage Bamako de Moscou comme dans les années 60, période de décolonisation. « Nous voulons que la Russie vienne traiter nos problèmes sécuritaires, explique-t-il. Nous avons vu la coopération militaire russe avec d’autres pays, comme la Syrie, ou plus récemment la Centrafrique. Nous sommes convaincus que des militaires russes feront davantage que la France. » souhaite Sidi Traoré. En clair, les Russes sont présents dans l’esprit de beaucoup de malien surtout avec Assimi Goïta, le nouveau président malien, qui aurait suivi des formations en Russie. Ainsi, le Ministre de la Défense et des Anciens Combattants, le Colonel Sadio Camara, a reçu en audience l’Ambassadeur de la Russie au Mali, M. Igor Anatolievich Gromyro, le mardi 15 juin 2021 dans la salle de conférence de son département pour discuter des questions d’intérêts communs. Quoi qu’il en soit, le Mali devient un véritable enjeux géopolitique pour les puissances en présence. L’on tend doucement vers un nouvel partage informel de l’Afrique. Hélas pour le continent.