Afrique, Moyen Orient, Europe… La guerre comme politique internationale

Par François Charles

Une vieille histoire

Lorsque, au milieu du 19ème siècle, l’impérialisme anglais aidé par les Etats-Unis et la France, contraignait la Chine par la guerre, dite guerre de l’opium, à des traités inégaux totalement à l’avantage des puissances occidentales, s’ouvrait le long cycle des dominations économiques que consolideront les dominations coloniales.

Tous les états qui refusaient de se soumettre aux diktats des puissances impérialistes étaient immanquablement « ramenées à la raison » par le fracas des armes que les livres d’histoire rapporteront sous le nom de « diplomatie de la canonnière ». En fait, cette appellation recouvre simplement l’action qui consistait alors, après avoir stationné des navires de guerre au large des pays récalcitrants, à les bombarder depuis les bateaux, jusqu’à acceptation des conditions d’échanges commerciaux dictées par le pays agresseur.

On imagine sans peine la teneur et le déséquilibre des traités signés dans ces conditions.

Il aura fallu des années et des années de protestations et d’appel aux organisations internationales émanant des pays soumis à ces exactions pour que, au début du 20ème siècle, soit édicté une sorte de droit international garantissant une liberté d’action à tous les pays souverains. Il va de soi que l’immense part des pays soumis à la colonisation, privés de fait de toute souveraineté, se trouvaient exclus de ces nouvelles règlementations. C’est à dire l’ensemble du continent africain, l’Inde, l’Indochine française…

Les cyniques disent souvent que les promesses électorales n’engagent que ceux qui les croient, tous les observateurs des sessions électorales, où qu’elles se passent, en conviendront. D’autres cyniques eux, gouvernants, représentants politiques d’intérêts économiques majeurs, signent des traités pour mieux les bafouer sans même se donner la peine de les déchirer, même théâtralement.

Un des exemples les plus fameux restera à jamais, le traité de non agression signé entre l’Allemagne de Hitler et l’URSS de Staline qui verra, en fin de compte, les hordes nazies déferler un beau matin, sans prévenir, sur le territoire soviétique.

Pour le plus grand dommage du peuple soviétique, Staline avait cru à la « promesse » de Hitler…

Sans chercher aucunement à exonérer Staline et ses « conseillers » de leur erreur grossière, force est tout de même de reconnaître que, avant comme après cet épisode fameux, les « plus forts » se sont toujours affranchis de leurs engagements, ou des traités internationaux, au gré de leurs intérêts bien compris, économiques et politiques.

 

Les impérialismes s’imposent par la guerre

Ainsi, le temps d’après le second conflit mondial qui, après celui du début de siècle (1914), pour le partage du monde, voyait une nouvelle fois s’affronter les impérialismes occidentaux, l’impérialisme japonais, en concurrence directe avec les Etats-unis, se retrouvant allié avec l’Italie et l’Allemagne au sein du « groupe de l’axe », commençait à dessiner une situation nouvelle. On assistait ainsi à une période de guerres et de révolutions : Les guerres révolutionnaires de libération d’une part et les guerres de l’impérialisme contre l’émancipation des peuples, d’autre part.

Ainsi a-t-on vu l’impérialisme français tenter de contraindre par les armes toute l’Indochine pour finalement y être vaincu et devoir céder la place aux armées US qui débutaient ainsi la terrible guerre du Vietnam. Les français, concentrant alors tous leurs efforts de guerre contre l’Algérie en lutte ouverte pour son indépendance, s’y verront là aussi, finalement vaincus, tout comme l’impérialisme US qui, au terme du constat de sa défaite sur le terrain, après une incommensurable hécatombe humaine et très contesté dans son propre pays, sera contraint de quitter le Vietnam dans une précipitation et une panique qui feront le tour du monde des télévisions.

Dans la foulée de ces déroutes des impérialismes les plus agressifs, nombre des luttes de libération encouragées, notamment sur le continent africain, débouchèrent sur les indépendances et la configuration mondiale modifiée vit alors, en miroir, une modification de la stratégie des « plus forts ». S’ouvrait ainsi le temps long des guerres d’intervention en tout genre qui dure encore aujourd’hui.

Ni traités, ni ONU, ni « accords de paix »…Rien n’empêcherait plus les puissances impérialistes dominantes de faire respecter leur conception de l’ordre mondial.

Ainsi, contre l’avis de l’ONU, après le piège Koweïti, Bush père écrasera l’Irak sous les bombes alors que son fils, au prétexte fallacieux d’armes de destruction massives, y retournera ensuite pour, selon ses propres dires, « finir le boulot ! ».

Suivront, par les USA et l’Angleterre, l’invasion de l’Afghanistan, l’écrasement total de la Libye par la France et les USA, l’installation de l’armée française au Mali, l’opération Barkhane pour protéger les faramineux intérêts français dans toute la sous-région sahélienne alors que, soutenue par les USA et les impérialismes anglais, français, russe…en Palestine, dure depuis des décennies l’occupation militaire et coloniale d’un pays tout entier.

 

De l’Afrique à l’Europe, la loi des plus forts….

Quelles que soient les raison aujourd’hui invoquées par le pouvoir russe, rien ne justifie la guerre d’invasion qu’il impose à l’Ukraine. Nul ne doit être dupe, qu’il s’agisse de Sarkozy contre Kadhafi, des deux Bush contre Saddam Hussein, de Junior contre les Talibans ou de Hollande contre les terroristes au Mali…les agresseurs font toujours porter la culpabilité sur les agressés ou les envahis. Rien de nouveau sous le soleil.

Par ailleurs, depuis la chute de l’ex URSS, les oligarques, tous issus de l’appareil militaro-industriel d’état ou directement du KGB comme Poutine lui-même, après s’être attribué entre quelques uns, les plus grands secteurs producteurs de richesses du pays, n’ont eu de cesse, en véritables kleptocrates, de dépecer les entreprises d’état dont ils s’étaient accaparés la gestion.

Un capitalisme prédateur, aux méthodes issues d’un pouvoir totalitaire, qui s’est donné comme exécuteur d’une politique conforme à ses intérêts, un ancien apparatchik du KGB, brutal et autoritaire, en la personne de Vladimir Poutine.

De la même manière que Sarkozy, dans l’intérêt des entreprises françaises attaque et broie la Libye, que Hollande envoie son armée pour « sauver » le Mali, que Bush bombarde l’Irak pour sauver les irakiens…autant d’aventures impérialistes contre les peuples et voilà que, après avoir écrasé la Tchétchénie, envahi et occupé une partie de la Géorgie, être intervenu au Kazakhstan pour y mater une insurrection populaire, l’impérialisme russe veut maintenant s’attribuer la Crimée, le Donbass et les régions russophones, amputant pour cela un pays voisin souverain, le contraignant depuis 2014, à une situation de guerre civile.

Les arguments tels que la menace de l’OTAN, la « nazification de l’Ukraine »… avancés par Poutine, sont exactement du même ordre que ceux des autres impérialismes lorsqu’ils décident d’envahir, écraser un adversaire choisi ou intervenir sur le territoire d’un état souverain, ils sont fallacieux et irrecevables.

Aucun argument, quel qu’il soit, ne saurait justifier l’ingérence d’une puissance étrangère visant à empêcher les peuples du droit à disposer d’eux-mêmes.

A ce titre, exactement comme l’armée russe doit immédiatement quitter l’Ukraine, la France doit organiser le départ immédiat de toutes ses troupes stationnées en Afrique. Elle doit, de même, abandonner son système néocolonialiste prédateur concentré dans ce que, depuis les indépendances, on nomme la Françafrique.

 

 

 

 

 

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